Les anches de clarinette : bien les choisir, bien les entretenir

Les anches sont le cœur vibrant de la clarinette, ce petit bout de roseau ou de synthétique qui donne vie à l’instrument. Mais savez-vous comment bien choisir cet accessoire indispensable de la clarinette et en prendre soin ? C’est tout l’objet de cet article.

Nous verrons d’abord les critères pour sélectionner des anches adaptées à votre niveau et à vos attentes. Puis nous détaillerons les bonnes pratiques pour les entretenir au quotidien et prolonger leur durée de vie. Que vous débutiez la clarinette ou que vous soyez déjà un instrumentiste confirmé, ces conseils vous aideront à tirer le meilleur de vos anches !

Bien choisir ses anches de clarinette

Les types d’anches 

Il existe deux grands types d’anches pour la clarinette : les anches en roseau naturel et les anches en matériau synthétique.

Les anches en roseau restent les plus utilisées. Fabriquées à partir d’une plante méditerranéenne, l’Arundo Donax (connu en France sous le nom de « canne de Provence », elles offrent un son riche, chaud et nuancé, proche du timbre « historique » de l’instrument. Mais elles sont aussi fragiles, irrégulières et sensibles à l’humidité et à la température.

Les anches synthétiques, apparues plus récemment, tentent d’imiter les qualités du roseau avec des matériaux composites (fibre, résine, carbone). Plus durables et stables, elles sont appréciées pour leur longévité et leur résistance aux aléas climatiques. Mais leur sonorité est souvent jugée un peu froide et « plastique » par rapport au roseau.

Le numéro de force

Les anches sont classées par numéro de force, c’est-à-dire de souplesse ou dureté. L’échelle va généralement de 1 (très souple) à 5 (très dur), avec des graduations intermédiaires (1.5, 2.5, 3.5) :

• Plus une anche est souple, plus elle est facile à émettre mais limitée dans les nuances.
• Plus elle est dure, plus elle offre de résistance et de puissance mais demande davantage de maîtrise.

En début d’apprentissage, mieux vaut choisir une anche souple (1.5 ou 2) pour se familiariser avec l’instrument sans forcer. Puis on « monte » progressivement en force pour gagner en richesse sonore. Les pros jouent généralement sur des anches entre 3 et 4.5. Mais le numéro idéal dépend aussi de la morphologie, du matériel et du répertoire de chacun.

La forme de l’anche

Au-delà de la force, les anches se distinguent par leur coupe, c’est-à-dire la forme donnée au roseau par le fabricant.

On parle de profil « juste », « long » ou « large », selon l’épaisseur et la longueur de la pointe (la partie la plus fine de l’anche). Un profil juste favorise la précision et la réactivité, un profil long donne plus de son et de grave, un profil large allie puissance et souplesse.

Certaines marques proposent aussi des anches « déjà jouées » (filed cut), dont l’extrémité a été pré-usée pour réduire le temps de rodage. C’est une option intéressante pour les débutants qui veulent un confort de jeu immédiat. Mais ces anches ont souvent une durée de vie plus courte.

Les marques et modèles

L’univers des anches de clarinette est vaste et foisonnant !

Les marques les plus connues sont le français Vandoren (leader mondial), l’américain Rico (racheté par D’Addario) et l’espagnol Gonzalez. Mais il en existe beaucoup d’autres, avec chacune ses spécialités et ses best-sellers.

Par exemple, chez Vandoren, on trouve les modèles « Traditionnelles » (les plus polyvalentes), « V12 » (pour le jazz et les sons saturés), « 56 Rue Lepic » (pour la douceur et la rondeur)…Chez Rico, les « Reserve » sont réputées pour leur projection. A vous de faire votre choix !

Les critères de sélection

Comment choisir parmi toutes ces références ? Voici quelques critères pour y voir plus clair :

• Votre niveau : en début de parcours, orientez-vous vers des anches souples et faciles à jouer (Rico Orange, Vandoren Juno). Plus vous progressez, plus vous pouvez monter en force et en technicité.  
• Votre matériel : vérifiez que le modèle d’anche est compatible avec l’ouverture et la longueur de votre bec. Certains becs demandent des anches plus dures ou plus souples.
• Votre style musical : selon que vous jouez plutôt classique, jazz ou contemporain, vous n’aurez pas besoin des mêmes qualités d’anches. Renseignez-vous sur les modèles plébiscités dans chaque esthétique.
• Votre budget : les anches sont un consommable qu’il faut renouveler régulièrement. Fixez-vous un prix maximum à l’unité (entre 1,5€ et 4€ en moyenne) et au paquet (entre 15€ et 40€). 
• Vos préférences : c’est en jouant que vous saurez ce qui vous convient. N’hésitez pas à tester plusieurs forces et modèles, à les comparer, à les mixer. De nombreux magasins proposent des anches à l’unité pour cela.

Enfin, un conseil : au moment de l’achat, examinez bien chaque anche à la lumière. Ecartez celles qui présentent des fentes, des taches, des irrégularités. Même dans un paquet, toutes les anches ne se valent pas. Une bonne sélection au départ vous évitera des déconvenues à l’arrivée !

Bien entretenir ses anches

Le trempage

Avant de jouer, il est essentiel de tremper son anche quelques minutes dans de l’eau froide ou tiède. Ce geste simple permet d’hydrater et d’assouplir le roseau, pour qu’il vibre de façon optimale sous l’action du souffle et de l’embouchure. Sans trempage, l’anche reste sèche et rigide, le son est plus dur à émettre et moins homogène.

Le temps de trempage idéal se situe entre 1 et 3 minutes, selon l’épaisseur et la force de l’anche. On peut utiliser un petit récipient dédié, ou simplement la bouche en cas de dépannage. L’essentiel est que l’anche soit bien immergée, jusqu’au talon (la partie la plus épaisse). Évitez de la laisser tremper trop longtemps, elle risquerait de se gorger d’eau et de perdre en réactivité.

Le séchage et le rangement

Après le jeu, il faut laisser l’anche sécher à l’air libre quelques minutes, avant de la ranger dans un étui ou une boîte hermétique. Le séchage permet d’évacuer l’humidité et la salive accumulées pendant la séance, qui pourraient abîmer le roseau et favoriser le développement de bactéries.

Pour un séchage optimal, posez l’anche à plat sur un tissu propre et sec, à l’abri de la chaleur et de la lumière directe. Ne la frottez pas, ne l’essuyez pas, laissez-la s’égoutter naturellement. Une fois bien sèche, rangez-la dans un contenant aéré et spécifique, sans la mélanger avec d’autres objets. L’idéal est d’avoir plusieurs anches d’avance, et de les faire tourner pour leur laisser le temps de se reposer entre deux utilisations.

Le nettoyage et l’hygiène

Même avec un séchage soigneux, les anches finissent par accumuler des résidus de salive, de dépôts calcaires, voire de moisissures. Pour les nettoyer en douceur, rien ne vaut un bain hebdomadaire dans une solution désinfectante spéciale, à base de chlorhexidine ou d’huiles essentielles. Vous en trouverez en magasin de musique ou en pharmacie.

Plongez vos anches 5 à 10 minutes dans le bain, puis rincez-les à l’eau claire et laissez-les sécher sur un papier absorbant. Elles retrouveront leur souplesse et leur brillance d’origine. Ce nettoyage régulier est indispensable pour préserver leur qualité de vibration et leur durabilité. C’est aussi une question d’hygiène, pour éviter les mauvaises odeurs et les contaminations buccales.

Le rodage et l’usure

Une anche neuve a besoin d’un temps de rodage pour donner le meilleur d’elle-même. Son grammage et sa géométrie vont évoluer sous l’effet de l’humidité et de la pression des lèvres, jusqu’à trouver leur équilibre. Ce processus peut prendre quelques jours à quelques semaines, selon la fréquence et la durée du jeu.

Pendant cette période, il est normal que l’anche « pique » un peu et manque de stabilité. Ne vous découragez pas, jouez-la par petites sessions de 10 à 15 minutes, en alternance avec des anches déjà rodées.

Progressivement, le son va se libérer, les attaques vont s’adoucir, la justesse va se préciser. À l’inverse, une anche qui a beaucoup servi finit par s’user et par perdre ses qualités. Elle devient de plus en plus souple, poreuse, difficile à contrôler. À ce stade, mieux vaut la remplacer pour ne pas développer de mauvaises habitudes et forcer inutilement.

Les petites réparations

Il arrive qu’une anche neuve ou en cours de rodage présente des défauts mineurs, qui affectent son émission ou sa tenue. Par exemple, une pointe trop fine qui se plie, un coin plus dur qui accroche, une fente qui se propage.

Avant de la jeter, vous pouvez tenter quelques retouches pour la « sauver » :

• Égalisez la pointe en la frottant doucement sur un papier de verre très fin, pour supprimer les aspérités.
• Limez les coins en biseau avec un petit couteau bien aiguisé, pour adoucir l’attaque et libérer la vibration.
• Collez la fente avec une goutte de vernis à ongles transparent, pour l’empêcher de se propager.
• Grattez le dos avec un grattoir spécial (reed rush) pour amincir l’épaisseur et regagner en souplesse.

Ces opérations délicates demandent du doigté et de la mesure. N’enlevez jamais trop de matière d’un coup, procédez par petites touches et vérifiez le résultat à chaque étape. Avec de la pratique, vous saurez diagnostiquer et corriger vous-même les principaux problèmes des anches.

Conclusion

Vous l’aurez compris, les anches sont bien plus qu’un simple consommable pour la clarinette. Ce sont de véritables outils de précision, qui conditionnent largement la qualité et le confort de votre jeu. Les choisir avec discernement, les entretenir avec soin, c’est se donner les moyens de progresser et de s’épanouir pleinement dans sa pratique musicale. Alors, prenez soin de vos anches comme de fidèles compagnes. Elles vous le rendront au centuple !